Monday, September 18, 2006

Prolétaires de tous les pays, n'écoutez pas Marx !

Pas encore un seul post sur le communisme.... Je vais tâcher de rectifier mon erreur.

Marx a dit dans son Manifeste que la propriété collective des moyens de production permettrait à l'humanité de progresser. Les moyens de production devaient donc appartenir à la société, qui était assimilée à l'Etat. A terme, l'Etat devait disparaître au profit de la dictature du prolétariat. Cette bienfaisante idéologie sur le fond (qui n'a pas envie d'améliorer l'humanité?!) a été un échec complet, non pas parce que les individus à la tête de ces Etats étaient les "mauvais individus" mais parce que le système en lui-même était intrinsèquement "mauvais" (anti-libéral, inefficace que ce soit sur le pur plan productif ou simplement en termes de réduction de la pauvreté, de la colonisation, etc.).

L'Azerbaïdjan est plus que jamais un exemple de la souffrance que certains individus épris d'idéaux égalitaires ont fait subir à d'autres. Malheureusement, les conséquences du communisme sont aussi néfastes après sa chute que pendant son apogée.

Primo, le communisme était une idéologie impérialiste. Sous couvert de propager l’idéal révolutionnaire, les caciques du parti ont entrepris un véritable programme de russification des contrées « libérées du capitalisme bourgeois» (colonisées). Et le russe servait en retour la cause du communisme car permettait une meilleure centralisation des informations et la lutte contre les éléments réactionnaires de la société dans l’ensemble soviétique. Russification et propagation du communisme allaient donc de pair. En 1918, les bolcheviques ont fomenté un coup d’état à Bakou. L’année d’après, ils organisaient dans le pays une conférence internationale contre l’impérialisme. Quelle blague !

Les cultures nationales ont été détruites au profit d’une culture russe elle-même épurée de ses symboles bourgeois. Bref, il ne restait pas grand-chose. Certes, il y avait les carrés et les ronds de Malevitch mais pas de quoi fouetter un chat !!! Quant à ceux qui sont restés, comme Eisenstein ou même Chostakovitch, ceux-ci étaient suffisamment intelligents pour que leurs œuvres offrent une double lecture. Les enseignements et les arts étaient en russe, et chantaient la gloire du régime.

A l’heure des indépendances et du passage à des pseudo économies de marché, la soif de consommation a surpris nos « camarades » d’Europe de l’Ouest qui s’en sont immédiatement indignés. « Le capitalisme a apporté l’ultra-matérialisme à ces pays ! Nous avons corrompus leurs âmes pures ! » disent-ils… C’est oublier que ces individus ont tout autant le droit que nous à disposer de biens de consommation bon marché, et c’est surtout oublier que leurs cultures nationales, régionales et locales respectives ont tout simplement été exterminées au profit de la seule culture propagandiste soviétique. Pas un hasard que des pays comme la Pologne, la Chine ou la Russie plongent dans une ivresse consommatoire aujourd’hui. Bizarrement, les cultures indienne et thaïlandaise résistent beaucoup mieux à la culture occidentale dans ses mauvais aspects. Car ces pays ont par le passé laissé plus de libertés économiques et culturelles à leurs peuples.

En second, le communisme a injecté dans ces pays un ensemble de biens périmés. Quand je dis « biens », je parle au sens large. J’évoque ici autant les biens de consommation purs (vêtements, voitures = les fameuses ladas, etc.), que les biens de production comme un train, une route, un bâtiment. En Azerbaïdjan, on peut tout de suite reconnaître ce qui a été produit à l’époque soviétique : moche, peu solide, peu fonctionnel… Et on peut tout aussi facilement reconnaître un building construit à l’époque soviétique (le comble de la laideur architecturale).

Tercio, l’homo sovieticus n’a toujours pas quitté les terres azerbaidjanaises. Il y a ici un ensemble de comportements qui prennent directement leurs racines dans l’édification de la société socialiste. Les gens de l’ancienne génération ne sont pas entreprenants : ils attendent toujours que quelqu’un d’autre prenne une décision (un vieux réflexe qui est attribuable au fait que l’on ne voulait pas devenir responsable de la non-satisfaction du plan écrit à Moscou). Autre exemple, les vendeurs des magasins n’ont toujours pas compris que le client est roi. Pas de sourire, pas d’efforts… Toujours une mentalité où l’on est salarié du régime, et non chef de son propre magasin. Généralement, le client ne peut pas accéder aux biens. Il doit les montrer au vendeur qui se chargera alors de lui présenter le bien. Une sacrée perte de temps, et un gâchis du plaisir de consommer. Cela inhibe totalement l’achat impulsif.

Quatrièmement, le communisme faisait tout reposer sur la bureaucratie. Dans les faits, la corruption était très élevée car il fallait échapper aux rouages du plan (côté production) et de la pénurie (côté consommation). Malheureusement, cette culture n’a pas disparu avec le passage à l’économie de marché (en fait, il n’y a jamais eu de passage vu que 70 % de l’économie appartient toujours à l’Etat dans le pays). Au final, toujours impossible de faire du business dans le pays sans connaître quelqu’un du gouvernement ou des ministères. Il faut payer un nombre incroyable de pot-de-vin. Aujourd’hui, l’Etat est plus que jamais prépondérant dans toutes les sphères de la société. Au final, il y a les apparatchiks qui s’enrichissent avec le pétrole et les monopoles qu’ils se sont eux-mêmes attribués. Et il y a le reste de la population qui vit sous perfusion tant que l’argent du pétrole est injecté dans l’économie. Mais que va-t-il advenir du pays dans 20 ans, quand le pétrole viendra à disparaître ??? Pour ceux qui critiquent l’Azerbaïdjan ou la Russie comme des exemples de capitalisme sauvage, sachez que ces systèmes ne sont pas des systèmes capitalistes mais des monstruosités systémiques résultant d’une transition inachevée et mal gérée. Leurs Etats sont toujours aussi autoritaires et rien ne semble avoir vraiment changé par rapport à avant.

Pour résumer, je dirais que le communisme a tout interdit : la consommation, l’art, la religion, la conscience politique non contaminée… Les seules valeurs qui avaient cours à l’époque étaient celles de la lutte révolutionnaire. A l’indépendance, ces valeurs ont été rejetées car elles symbolisaient l’oppression. Ces sociétés se sont retrouvées dans un vide de valeurs. Dans de telles circonstances, la malculture (bien que je n’aime pas ce mot), le fondamentalisme religieux, l’extrémisme politique se sont plus facilement imposés que dans des pays qui ont eu le temps de construire leurs propres rapports à la consommation, la religion, l’art, le politique. Les bonnes choses mettent du temps à se construire. Et le rouleau soviétique est passé dessus sans rien laisser. Maintenant, il refaudra du temps pour construire à nouveau. Si on peut être optimiste pour les pays d’Europe centrale, je ne le suis pas pour les pays d’Asie Centrale et de la proche sphère russe (Biélorussie, Ukraine).

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